Lisières

[Les peuples de l'Ombre]
  • 1. Ravine 2
  • 2. Akeley 2
  • 3. Dead Stars 4
  • 4. Leviathan
  • 5. Minerve chassant les Vices du jardin de la Vertu
  • 6. Ruche cévenol
  • 7. Storia di Silenos, scena: Bacco scoperto miele
  • 8. Lisières
  • 9. Heart of Darkness
  • 10. Humains
  • 11. Fatboy
  • 12. Anatomie comparée
  • 13. Table du Silence
  • 14. Gardien
  • 15. Time lapses us
  • 16. Paradis 5
  • 17. Eve & Adam 4
  • 18. Eve & Adam 3
  • 19. Eve & Adam 2
  • 20. Eve & Adam
  • 21. Adam and Eve driven out of Paradise
  • 22. Galerie d'Anatomie Comparée
  • 23. Tree of life
  • 24. L'arbre apostolique
  • 25. L'arbre généalogique du Christ
  • 26. Time laps’ us !
  • 27. Time lapses Us (Bernardins)
  • 28. Grande galerie de l'évolution
  • 29. Arche
  • 30. Paradis 7
  • 31. Cimes
  • 32. Paradise
  • 33. Buisson d'oiseaux exotiques
  • 34. Dead Stars 1
  • 35. Dead stars (Exposition)
  • 36. Mosaïque des 4 fleuves
  • 37. Jardin (tapis)
  • 38. Tapis de chasse
  • 39. The Virgin and Child with Canon van der Paele
  • 40. Hortus conclusus
  • 41. Dead Stars 3
  • 42. Morte del Sole, della Luna e caduta delle stelle
  • 43. Orion
  • 44. Orion aveuglé
  • 45. Police criminelle
  • 46. Draughtsman Making a Perspective Drawing of a Reclining Woman
  • 47. Mejyritch
  • 48. Orion aveugle (sacristie)
  • 49. Gisant
  • 50. Orion
  • 51. Empire of Nature, nature of Empire
  • 52. Brot und arbeit
  • 53. A lack of hearing
  • 54. Sauvage (!?)
  • 55. Koko!
  • 56. Jumbo & Barnum
  • 57. Jumbo & Mungo
  • 58. N°1
  • 59. Stone
  • 60. Mythe?
  • 61. Dis moi ..., je te dirai ...
  • 62. Les larmes de Byblis
  • 63. Jardin
  • 64. Akeley
  • 65. Le silence d'un monde
  • 66. Utopia
  • 67. Dans l’horizon de l’infini
  • 68. Terre!
  • 69. From Paradise
  • 70. Impureté
  • 71. Falaise
  • 72. Time lapses us to.
  • 73. Gorgone
  • 74. Animal locomotion
  • 75. Paysage blessé
  • 76. Les invisibles
  • 77. A mountain
  • 78. Les terres d'un monde fini
  • 79. Orion
  • 80. Eau et crocodile
  • 81. Le Roi des Aulnes
  • 82. System of subterranean fires
  • 83. Lamassu
  • 84. Le triomphe de la mort
  • 85. Pan est mort
  • 86. Heart of shadow
  • 87. La Grande Barrière
  • 88. Lord
  • 89. Ciel
  • 90. Avant-poste (Ruhnu)
  • 91. ichtiosaurus
  • 92. Splash
  • 93. Paradis terrestre
  • 94. Nature of Empire
  • 95. Le christ mort
  • 96. Cimes
  • 97. The Unicorn is in Captivity and No Longer Dead
  • 98. Dead stars 2
  • 99. Humains
  • 100. Mejyritch
Présentation de la table:

Chercheur: Vincent Chevillon
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Vincent Chevillon développe une recherche au long court qui l’amène depuis plusieurs années à réétudier et réévaluer les fondements de notre société moderne, à savoir l’invention d’une séparation franche et théorique entre culture et nature, d’un monde sans limites à conquérir et à domestiquer.
Par un va et vient entre des actualités spécifiques et leurs inscriptions dans des systèmes géographiques, historiques et culturelles plus obscures, ses recherches œuvrent à la cohabitation de formes, d’attitudes et de savoirs au sein de cosmogonies croisées. Sa pratique tend à rendre manifestes des états de surface, des agencements, prononce ce qui à l’abri des regards, agite secrètement le monde. Ses champs de recherche explorent les marges de notre modernité. Il s’interroge sur notre relation à l’ailleurs par le biais de ces marges, à ce qu’elles limitent et prononcent de part et d’autres.

Dans Lisières, en exhumant des traces dans les collections des Muséums d’histoire naturelle et dans réserves naturelles, l’auteur se livre à une entreprise d’enquête et de révélation/réévaluation, et pointe la capacité qu’à l’image à faire émerger ou à recouvrir, à conditionner notre regard sur la «nature».
Paradoxalement, ce projet tente par l’image d’activer l’inanimé, attire des présences oubliées dans des espaces délaissés.
L’enjeu de cette pratique est de leur préparer une scène, un cadre, un contexte pour les faire entendre.

« Rendre la parole à ... » c’est également inventer des dispositifs qui le permettent, ou qui engagent nos sensibilités à cet égard. Rien de stable pourtant, pas d’assurance, de discours établis, de solutions prêtes à l’emploi ou d’alarme tonitruante.
Histoires oubliées, fertiles, nécessaires à la compréhension de notre environnement actuel et de notre perception de celui-ci… Il ne s’agira pas de désigner, de dénuder les ombres mais d’avancer à tâtons, avec prudence. Par la genèse d’objets à interprétation plurivoque, s’établit un pont, un dialogue entre scientifiques et citoyens non spécialistes.
En exhumant des histoires, il ne cherche pas à figer ce qui n’est plus, mais à re-susciter, en fabulant le passé pour mieux l’honorer, en observant le présent pour mieux l’entendre.

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Emeline Dufrennoy, curatrice indépendante.

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[...] N’est-ce pas cet affrontement entre deux écologies – classer ou habiter, comparer ou raconter – que nous donne à voir Vincent Chevillon à travers deux séries d’images qui s’entrecroisent ?
[...] La première regroupe des objets d’histoire naturelle en liaison étroite avec l’anthropologie. Les êtres humains semblent absents mais, en réalité, ils apparaissent sous la forme d’une inscription énigmatique « Humains » portée sur la façade d’un meuble de vitrine qui ne révèle pas son contenu. Dessus est posé un buste de Cuvier, l’orientation de trois- quarts mettant en valeur un profil à l’antique conforme aux normes de la grandeur savante de cette époque. [...] Les photos prises dans les réserves et les greniers du Musée d’histoire naturelle de Strasbourg créé en 1818, devenu Musée zoologique en 1893, ont la tonalité crépusculaire d’objets naturalistes qui semblent avoir été oubliés, posés de manière incongrue, recouverts d’un drap, empilés sur des étagères, comme si s’était évanoui le projet qui leur donnait utilité et éclat. Le spectateur d’aujourd’hui aura du mal à voir dans ces images la vitrine d’un projet impérial, celui d’une science allemande triomphant par sa capacité à collecter, classifier et exposer des spécimens venus de ses territoires coloniaux et de ses réseaux mondiaux de correspondants. Restent donc des ossements, des animaux empaillés, des habitats qui sont des naturalia mais subsistent ici comme des artefacts produits par des êtres humains explorateurs et collectionneurs disparus depuis longtemps.
[...] La deuxième série d’images, prises à l’extérieur, a toutes les apparences du monde vivant cher à Ingold. Des feuillages et des troncs d’arbres, des terriers et des habitats d’insectes, des clairières et des orées, des rivages et des océans se succèdent sans ordre fixé à l’avance. Le cadrage permet d’en apercevoir tous les détails, les stries des roches, les nervures des feuilles, le tremblement des buissons, le grain des sables.
[...] Le monde de Chevillon est [...] peuplé d’aiguilles, de rochers, de feuilles, de rivages, c’est-à-dire des entités aux bords tranchants qui assument une mise en monde par la discontinuité entre les existants.
[...] Même s’il assume qu’il n’y a pas de connaissance sans médiation, le propos de Chevillon n’est pas d’isoler différentes manières de figurer qui donneraient à voir l’armature ontologique du réel, mais d’exhumer, de collecter, d’exposer. En somme d’être un explorateur.

EXTRAITS DU TEXTE LE GRAMMAGE DU MONDE, GRÉGORY QUENET DANS « LISIÈRES », PÉTROLE ÉDITIONS, 2021