Dès qu’un phénomène se manifeste, il quitte le bruit, dès qu’une apparence surgit et point, elle se révèle en voilant le bruit. Donc il n’est pas de la phénoménologie, donc il est de l’être même. Il s’établit dans les sujets comme dans les objets, dans l’ouïe et dans l’espace, dans les observateurs et dans les observés, il traverse les moyens et les outils d’observations, ou matériels ou logiciels, canaux construits ou langues, il est de l’en-soi, il est du pour-soi, il franchit les plus vieux et les plus sûrs partages de la philosophie, oui, le bruit est métaphysique. Il est le complément à la physique, au sens le plus large. On entend son halètement subliminal en haute mer. Le bruit de fond devient l’un des objets de la métaphysique. Il est aux limites de la physique et la baigne, il gît sous les découpes de tout les phénomènes, protée prenant toute apparence, matière et chair des manifestations. Noise, intermittence et turbulence, querelle et bruit, cette noise marine est la rumeur originelle. Nous l’entendons en haute mer. Michel Serres, Genèse, 1939